L’ego désigne la représentation et la conscience que l’on a de soi-même.
Tiré du latin et du grec « ego » signifiant « moi » ou « je ».
Toute la question est celle de notre vraie nature, notre vraie personnalité. Qui sommes-nous ?
Ce que nous croyons être, voulons être, ce que notre entourage dit de nous, ce que nous voulons faire croire au monde, les projections de nos parents nous concernant ?
Nos croyances accumulées au fil des expériences et que nous avons érigé en règles de vie ?
C’est toute l’ambiguïté de l’ego, c’est une apparence, une illusion qui se place entre nous (notre véritable nature) et la réalité.
Chaque fois que nous atteignons les sommets et que nous chutons, juste après, pour des raisons obscures et incompréhensibles nous le devons à notre ego.
Chaque fois que nous avons des objectifs et que nous faisons tout pour échouer (inconsciemment bien sûr) nous pouvons également le remercier.
Il est là, d’autant plus influent, cet ami encombrant qu’il est invisible, non situable, se confondant avec notre identité et notre personnalité.
C’est un caméléon psychologique. Prenant les couleurs de ce que nous souhaitons voir et nous disant ce que nous souhaitons entendre, ou croire ce que nous voulons croire.
Voyons-nous ce que nous croyons, ou croyons-nous ce que nous voyons ?
1.
Une perception erroné du réel qui nous influence

Je pense que c’est peut-être la partie la plus dangereuse de l’ego. Nous perdons le lien avec le réel.
Nous prenons donc des décisions et agissons ou nous exprimons sous influence.
Quelques exemples de la vie courante, afin d’illustrer le phénomène ego en marche :
- Quand votre esprit critique s’exprime concernant les autres ou soi-même.
- Se comparer aux autres, comparer les autres à soi-même.
- Vous vous justifiez et vous défendez.
- Vous vous mettez en avant ou tentez de vous valoriser, je cite mes titres et diplômes et réussites longuement.
- Vous ne savez pas écouter, vous interrompez l’autre pour parler de vous. Ou bien vous attendez que la personne ait fini de parler pour ensuite vous empresser de ramener le sujet sur vous, en commençant par « moi je ».
- Vous recherchez les compliments et la reconnaissance.
- Vous jugez quelqu’un ou quelque chose de bien ou de mal, correct ou incorrect, juste ou injuste, etc.
- Vous essayez d’arranger la vie des autres, de les contrôler, croyant que vous avez la réponse ou la meilleure solution pour eux, sans que ces personnes ne vous l’aient demandé.
- Vous voulez avoir le dernier mot, étant certain d’avoir raison.
- Vous exagérez en utilisant des superlatifs comme jamais, toujours.
- Vous mentez, ou modifiez la réalité à votre avantage.
- Vous vous racontez des histoires et finissez par y croire.
- Vous avez une attention excessive à votre image, votre réputation, ce qui est dit de vous.
- Quand on n’aime pas entendre de critiques ; c’est notre ego qui se met en travers.
- Quand on dévalorise les autres ou leur travail ; le message sous-jacent est je suis mieux qu’eux, je fais mieux, ma valeur est plus grande.
- Trop argumenter afin de convaincre, vouloir avoir le dernier mot.
- Même dans l’expression de ce que l’on appelle le syndrome de l’imposteur, notre ego joue un rôle en contrepoint.
Si je devais résumer en un mot quand nous sommes sous le contrôle de notre ego c’est quand nous sommes dans le paraître. Comme si notre vie, notre statut étaient mis en danger, et qu’il nous fallait défendre à tout prix notre image.
Le grand piège de l’ego est de faire croire que l’interprétation que nous avons des évènements, situations, personnes est la réalité. Dans une confusion auto entretenue entre analyse et impression.
Si penser le monde à partir des faits, se forger une opinion, analyser est souhaitable afin de tenter de comprendre le monde et les personnes autour de nous. Notre ego s’interpose et met une dose de subjectivité auto centrée.
2.
Un sentiment de puissance qui peut conduire à l'échec
L’ego est une centrifugeuse qui va tout ramener à vous et votre « histoire sociale ». L’histoire sociale est le visage que nous souhaitons montrer à la société. C’est un mélange de traits d’identités, d’expériences que nous avons vécues et qui ont forgé notre comportement et attitude générale en société.

L’ego va veiller à ce que rien ne vienne contredire cette histoire sociale. Certains parleront de personnages que nous jouons. Toutes ces images parlent de la même chose.
Nous trouvons notre équilibre à partir de cette identité construite au fil du temps. Nous nous définissons avec certaines caractéristiques.
Nous nous sentons en sécurité dans ce cadre connu et entretenu d’ailleurs par notre ego.
Il suffit que nous connaissions certains succès professionnels et personnels pour que l’ego nous fasse ressentir un sentiment d’autosatisfaction, de sécurité, d’aboutissement et à la fin de toute puissance.
L’arrogance, l’autosatisfaction sont une manifestation de l’ego.
Et là le piège se referme immanquablement, c’est une question de temps.
La réalité a une constante c’est sa mouvance, son changement, le monde est construit non pas sur la stabilité mais sur le mouvement, la transformation, l’évolution.
La limite principale de la personnalité gérée via notre ego est le statu quo. Pour que tout aille bien, les repères doivent rester les mêmes.
Face aux premiers signaux faibles d’une évolution à laquelle il faudrait s’adapter, l’ego va veiller à ce que l’interprétation des sujets aboutissent à considérer que tout va bien et que l’on doit continuer comme avant.
Parfois les sujets finissent par s’abuser eux-mêmes, l’ego faisant tenir au sujet des propos éloignés de la réalité observable. On retrouve des personnes qui vont expliquer malgré des résultats objectifs mesurables en baisse ou mauvais tous les motifs pour lesquels il faut les voir sous un angle positif.
Le principal problème est que l’ego retarde l’appréhension du réel, donc l’ajustement de l’action afin de coller à la réalité. En éloignant le sujet de cette prise de conscience salutaire l’échec devient la conséquence logique.
L’ego, dans une certaine mesure est également dans le déni. Il préfère, à la réalité, aux faits, une réécriture convenable pour nous. Comme la réalité objective est complexe et multifacettes il se nourrit de cette complexité afin de choisir les éléments à prendre en compte.
Si le digital a créé un monde virtuel, nous nous y complaisons toutes et tous car le virtuel existe, dans la nature humaine, depuis des temps immémoriaux grâce à notre ego.
A tel point que l’on peut se demander si le digital n’est pas, par certains aspects une construction égotique de l’humanité. Plutôt que de voir le monde tel qu’il est et s’y adapter, construisons un monde fait sur mesure.
Si nous avons toutes et tous un ego ; il a un poids plus ou moins grand selon les personnalités, et les cultures d’ailleurs. En Inde, au Tibet par exemple l’égo est depuis des lustres l’objet d’une mise à distance volontaire car ses effets négatifs ont été soulignés.
Nous ne sommes pas toutes et tous egos. Pour certains l’humilité, la distance par rapport au succès comme à l’échec, la modestie sont des valeurs pratiquées.
Pour d’autres les signes extérieurs de succès, la compétition, l’affrontement, la comparaison, l’agressivité sont un mode de fonctionnement où il faut sans cesse être toujours plus beau, riche, compétent, efficace, le premier.
Rien en soi n’est mauvais, c’est dans la dose que se trouve le poison.
3.
Fait-il supprimer notre ego ?
Comme tout ce qui fait notre équilibre psychologique en tant qu’être humain, si l’ego existe c’est qu’il a une utilité.
Donc vouloir le maîtriser, le supprimer, le modifier semble peine perdue. D’abord parce que pour supprimer quelque chose il faut être capable de le situer précisément. Or l’ego est nulle part et partout à la fois.
Lutter contre n’est pas non plus une bonne solution. Nous avons souvent constaté lors de nos accompagnements que vouloir lutter contre un phénomène dépense de l’énergie inutilement. De surcroît cela provoque généralement une force contraire de même intensité.
Toute la démarche consistera à rechercher à ce que son ego soit apaisé, débarrassé de l’obsession du « Qu’est-ce qu’on va penser de moi ? » ou du « Est-ce que je suis à la hauteur ? »
C’est le psychiatre Christophe André qui donne une piste « l’idée n’est pas de se détacher de l’ego de façon obsessionnelle, mais nos efforts doivent nous porter vers le non-attachement à l’ego. » Christophe André (Trois amis en quête de sagesse).
C’est plus qu’une lutte intérieure, un questionnement à son attention, face à certaines situations et réactions spontanées qui nous viennent ou décisions rapides. Prendre un peu de recul et se demander qui parle ? Mon ego ?
L’ego a quand même de bons côtés ; c’est lui qui nous donne parfois de saines réactions dans un sursaut d’orgueil. Aime la compétition, les comparaisons, la confrontation, les classements, les honneurs.
Toute la question est celle de la mesure, de l’équilibre et de la dépendance ; Laisser son égo prendre le contrôle et vous êtes en présence de personnes arrogantes, imbues d’elles-mêmes, dans l’affrontement afin de gagner. Elles créent autour d’elles des tensions. Elles se mettent en avant, ramènent toute question à elles. Défendent leur intérêt parfois contre celui des autres.
Le sujet n’est plus maître de ses réactions, c’est l’ego qui laisse la personne « en pilotage automatique ». Tout le monde peut comprendre les limites de ne plus être le vrai maître de ses actions ou réactions.
Enfin vous trouverez des personnes qui sont attachées à l’apparence, aux signes extérieurs (habillements, accessoires, voiture, etc.) qui valident aux yeux des tiers l’histoire sociale qu’ils souhaitent valider aux yeux du monde.
4.
Comment faire concrètement ?
La première action est la conscience de l’existence de l’ego. Nommer un phénomène le reconnaître c’est déjà le maîtriser. Beaucoup de personnes vivent sans se préoccuper de l’existence de son ego et ses effets. Une fois cet effort de conscience réalisé il sera assez « facile » d’apprendre à distinguer ce que nous faisons qui correspond à la réponse à une véritable aspiration et ce qui est une satisfaction de notre ego.
Vous achetez une voiture, vous pouvez la choisir pour son confort, sa puissance, sa place à l’intérieur, son respect de l’environnement, sa beauté qui vous touche.
Vous pouvez également considérer que tel véhicule souligne bien votre réussite sociale, qu’elle en jette et qu’elle impressionnera. Sous ce deuxième aspect l’égo s’exprime.
Toute la question est de le comprendre, l’identifier et lui donner la place que vous décidez.
Ne juger ni soi ni les autres sévèrement. Quand on a un peu d’expérience de la nature humaine on comprend assez vite que chacun essaie de s’en sortir comme il peut, avec ses moyens, son histoire, ses forces et ses faiblesses. Quelle est la valeur de ces affirmations blessantes, opinions superficielles, critiques, opinions dévalorisantes…
Comparaison n’est pas raison. Là aussi on ne sait pas tout, de ce qu’a représenté de travail, d’abnégation, de souffrance la réussite des personnes qui réussissent. Si l’on veut progresser quel que soit le domaine que l’on a choisi, il faut s’améliorer, apprendre, travailler. Bref se concentrer sur son propre jeu. L’atteinte de la performance, de l’excellence sont des objectifs louables ; mais nécessitent un travail de chaque instant, une remise en cause personnelle permanente, beaucoup de travail. Se comparer ne produit aucune amélioration ni aucun résultat. Sauf à vouloir s’auto flageller ou au contraire se consoler.
Agir plutôt que parler. L’égo vit plus dans le fantasme, les déclarations, les rêves, les hallucinations, les discussions, les affirmations. Quand vous vous fixez des objectifs et que vous mettez tout en œuvre pour les atteindre, que vous agissez vous produisez des résultats. Développez cette part active concrète. C’est elle qui nous sauve face aux « rêves éveillés » que notre ego aime nous faire vivre. Selon Audiard « Un con qui marche va plus loin que deux intellectuels assis ».
Nous sommes une partie d’un ensemble plus grand que nous. La limite principale de l’ego est qu’il nous fait croire que nous sommes l’origine et l’aboutissement de tout. Si l’on veut prendre un peu de recul et faire preuve d’honnêteté tout ce que nous réalisons est possible grâce au concours des autres. Donc un peu d’humilité, de reconnaissance, de simplicité permettront d’équilibrer notre ego.
La peur est mère de tous les vices. Peur de ne pas être assez, de ne pas être à la hauteur, de ne pas avoir de valeur, de ne pas exister suffisamment dans le regard des autres… Or ces peurs « immatérielles » sont le produit d’un processus mental. Notre ego s’attache à tout ce qui nous valorise mais qui n’est pas véritablement nous. Les rôles que nous jouons, les belles choses que nous possédons, nos attributs les plus sages les plus flatteurs, etc.
C’est l’ego qui désire un objet, une promotion, plus d’argent… Avec l’objet du désir, l’ego ambitionne toujours de se renforcer, de se valoriser. À travers ce que nous désirons, nous cherchons inconsciemment à accroître notre identité ou plutôt notre sentiment d’identité. Nous désirons des choses pour tenter d’exister un peu plus grâce à elles. Quand nous désirons un vêtement, une voiture ou n’importe quoi d’autre, nous croyons inconsciemment que ce vêtement, cette voiture va ajouter quelque chose à qui nous sommes, va nous rendre spécial, intéressant, va nous apporter de la valeur. C’est une illusion. Les spiritualités orientales nous invitent à nous libérer des désirs parce qu’ils sont basés sur une illusion et sont l’objet d’une quête sans fin. Nous désirons sans cesse de nouvelles choses qui ne nous apportent jamais ce que nous recherchons.
Nos échecs ou épreuves sont une chance. Il y a une citation que j’aime beaucoup.
« Dans chaque épreuve, ne cherchez pas l’ennemi, cherchez l’enseignement. »
Mikao Usui – fondateur du Reiki
Souvent à l’occasion d’évènements plus ou moins douloureux (pour notre ego justement) la réalité s’impose à nous. C’est une bonne occasion de nous reconnecter à la réalité. De tenter de comprendre ce que nous pouvons faire avec cette situation. D’apprendre quelque chose et de progresser.
Rechercher et comprendre sa véritable identité. La nature a horreur du vide. Au même titre que Saint augustin expliquait que le mal c’est l’absence de bien. L’ego se positionne dans les espaces laissés vacants par notre manque d’estime de nous, de confiance en nous. Je termine volontairement par cet item car je pense sincèrement que le fameux « connais-toi toi-même » inscrit sur le fronton du temple de Delphes est la base de tout. Nous devons toutes et tous faire l’effort de découvrir notre véritable identité, quelles sont nos objectifs, quelles sont nos valeurs fondamentales sur lesquelles nous souhaitons bâtir notre vie. C’est un chemin long, tortueux, mais oh combien exaltant.
Rempli de notre véritable nature, nous pouvons vivre avec des repères plus sains et équilibrés.
CONCLUSION
Je pense que tout être humain souhaite trouver sa place, s’accomplir. S’accomplir non pas dans le sens que lui donnerait l’ego mais dans le sens de trouver sa vraie nature. Trouver sa nature c’est répondre à la question de son destin, de sa voie. Les deux sont liés.
Intuitivement on comprend bien que cette quête est l’essentiel. Qui suis-je ? pour quelle ambition suis-je fait ? Quelle est ma véritable voie ?
Se mettre en chemin à la découverte de soi est un voyage qui peut prendre, peut-être, toute une vie.
C’est le prix à payer pour vivre sa vie et pas une illusion.
Si l’ego peut nous être utile en chemin, nous avons vu que c’est un ami encombrant, animé de bonnes intentions, mais qui ne nous permet pas cette découverte de sa nature profonde et de son destin.
C’est la raison pour laquelle nos sagesses ancestrales s’en méfient.