Le moins que l’on puisse dire est que notre monde est mouvant, l’incertitude semble être devenue la règle.
Le gros problème est, que par nature, nous aimons le prévisible, nous préférons les situations sous contrôle. D’ailleurs dans beaucoup d’entreprises il y a un plan de crise à activer en cas de catastrophe qui est sensé nous expliquer comment faire face à chaque problème.
En tant que particulier nous avons notre plan B.
La vie semble, plus imaginative que nos classeurs de temps de crise ou nos plans B.
Beaucoup de personnes aujourd’hui cumulent avec la COVID19 et ses effets sur nos vies les imprévus. Toutes nos certitudes ont volé en éclats.
Je rencontre, chaque jour, dans mon cabinet des personnes qui souffrent et doivent s’adapter à l’inimaginable il y a quelques mois encore. Les « blessures » sont d’autant plus vives pour les sujets qui ont le goût du contrôle.
Quelles réflexions peuvent nous éclairer ?
1.
Abandonner l’illusion du contrôle

Naturellement nous sommes toutes et tous enclins à préférer la certitude à l’incertitude, le connu à l’inconnu.
Ceci explique en grande partie toutes les mesures que nous prenons afin de contrôler notre environnement. Nous tentons de gérer et anticiper les problèmes ; et il faut continuer à le faire. Sans toutefois se départir d’un certain réalisme. Tout ne peut pas être anticipé et prévu.
La gestion de projet a d’ailleurs élevé au rang d’art cette volonté de programmation et contrôle des différentes étapes.
C’est bien évidemment une méthode efficace ; la limite (tous les projets le démontrent quotidiennement) est que l’imprévu s’invite.
Or, très vite il convient de savoir faire la différence entre ce qui relève de notre domaine d’intervention et ce sur quoi nous n’avons aucune prise.
Nous pouvons choisir la destination de nos vacances mais nous ne pouvons pas maîtriser le temps qu’il fera. Tout au plus peut-on se renseigner avant de partir sur les prévisions météorologiques mais ça n’est pas une garantie à 100%.
Ensuite, la sensation du pouvoir sur les personnes et les évènements est tellement ancré chez certains managers que, pour eux, l’incertitude, les changements de contexte ne sont pas admis. Tout écart, par rapport à ce qui est prévu, est une faute inexcusable ou une faiblesse. Je vous laisse imaginer l’ambiance dans ces entreprises ou services.
Vouloir se prémunir de l’incertitude est un combat perdu d’avance ; la vie est plus imaginative que nous.
Contrairement à toute une philosophie managériale qui prône la toute-puissance de la volonté, le hasard, la chance existent. Ils ne jouent pas nécessairement négativement. Parfois « la providence » nous aide bien.
Il faut avoir une bonne dose d’humilité pour admettre que nos plus grands succès ont bénéficié d’un facteur chance non négligeable. Nous aimerions tellement que seul notre talent en soit l’unique cause.
A l’opposé les échecs ne sont pas, toujours, notre entière responsabilité, tant les paramètres complexes qui sont entrés en ligne de compte peuvent influencer le résultat.
2.
Intégrer le hasard, la chance, l’incertitude
En intégrant cette incertitude dans notre façon de diriger et manager, nous ouvrons la porte à l’adaptation et l’innovation.

Programmer, anticiper, évaluer sont utiles et fonctionnent. Les méthodes dites Agile nous ont appris qu’il fallait une certaine souplesse dans les organisations afin d’éviter trop de rigidité dans l’organisation et les comportements des acteurs d’un projet par exemple. Les procédures à suivre à la lettre produisent des monstres dangereux face à l’imprévu.
Il faut savoir édicter des règles mais aussi apprendre à leur désobéir quand c’est nécessaire, notamment quand un imprévu survient. L’adaptation, l’intelligence collective, la souplesse, la solidarité sont des talents plus utiles, dans ces circonstances, que la seule discipline aveugle.
D’ailleurs il ne faut pas craindre l’imprévu, qui peut avoir des effets positifs dans tous nos projets sur le long terme.
Le principal problème est que nous ne faisons pas assez de place, dans nos vies personnelle et professionnelle au hasard, la chance, l’imprévu.
Ce que nous appelons, la complexité. C’est une réalité avec laquelle il faut apprendre à composer.
A ce stade de notre raisonnement nous devons parler responsabilité. Le non-respect de la règle ou la transgression ne sont pas le propos de mes réflexions. Je dis simplement que nous devons inclure dans nos processus une marge de manœuvre qui permet l’adaptation à la réalité.
Afin d’éviter tout malentendu l’adaptabilité face à certaines circonstances non prévues peut être un processus en soi avec ses règles et responsables pour la mise en œuvre.
C’est pourquoi je préfère parler de gouvernance au sein des entreprises ; gouvernance qui sont un ensemble de pratiques, valeurs, procédures mais certainement pas un corpus de règles rigides et contraignantes.
3.
Quand la situation est le problème Accepter l’absence de solution.
Vous connaissez cette expression :
« La mauvaise personne au mauvais endroit au mauvais moment ».
Il faut admettre que certains problèmes n’ont pas de solution.
Mon expérience m’a amené à opérer une distinction entre situation et problème. Certaines situations que nous vivons sont sans solution.
Je me souviens d’un cadre bancaire qui était venu me voir car il avait une responsabilité fonctionnelle avec des collègues dont il n’avait pas la maîtrise hiérarchique. Il proposait et ces derniers faisaient ou pas. Par contre on lui faisait porter la responsabilité des résultats. De leurs résultats.
Après analyse sont savoir être et savoir-faire n’étaient pas en cause. Il servait de « fusible » facile pour son patron qui lui, était le vrai responsable hiérarchique mais n’assumait pas la responsabilité des résultats commerciaux. (Selon le bon principe je ne peux pas tout faire) mais il ne donnait pas à son collaborateur de moyens adéquats afin de réussir sa mission. Sa grande phrase était, il existe des leviers d’animation qui permettent de réussir sans avoir besoin du levier hiérarchique. Déclaration jamais illustrée d’exemples concrets.
A la réflexion ce type de situation crée le problème.
Le collaborateur avait deux alternatives :
- Négocier des moyens managériaux (ce qu’il a fait sans succès)
- Chercher une autre mission, ce qu’il a fait au sein de l’entreprise (sans succès.)
Le résultat ne pouvait qu’être le départ (négocié) de son entreprise. D’ailleurs son successeur a été doté du lien hiérarchique et de tous les moyens adéquats afin de réussir (ce qu’il n’a pas réussi non plus) sa mission.
L’alternative est de changer de situation dans tous les sens du terme. Ce qu’il a fait avec succès.
4.
La maîtrise enfin !
Passer du contrôle à la maîtrise suppose d’adopter, dans notre vie quelques principes simples.
Refuser cette séparation très artificielle entre la vie personnelle et la vie professionnelle. Nous savons toutes et tous pour l’avoir vécu ou vu autour de nous que les deux univers s’influencent et se nourrissent en bien ou en mal.
Je ne reconnais, pour ma part, que la vie tout court !
Et nous n’en n’avons qu’une. Autant qu’elle soit épanouissante et c’est possible.
Accepter l’incertitude, se débarrasser de cette idée de puissance ou de contrôle sur les évènements. Au profit de plus de souplesse, d’adaptabilité.
Savoir ce sur quoi on peut agir et le faire et accepter ce qui n’est pas sous notre contrôle. Nous pouvons simplement en atténuer les conséquences négatives éventuelles.
Accepter le monde tel qu’il est : beaucoup trop de mouvements de pensée prônent la toute-puissance, le volontarisme etc. plus d’humilité permettrait de voir les choses telles qu’elles sont plutôt que telles qu’on aimerait qu’elles soient et faire à partir de cette réalité. C’est moins poétique mais sûrement plus efficace. Il y a beaucoup plus de monde qui vit dans sa vision de la réalité que dans la réalité elle-même. Voyez-vous ce que vous croyez ou croyez-vous ce que vous voyez ?
Accepter de considérer les problèmes sous l’angle de la situation : c’est un peu l’œuf et la poule. Est-ce la situation particulière considérée qui génère le problème ? Si oui changer les paramètres de la situation ou de situation. Parfois il n’y a pas de solution. Il faut savoir partir ou faire autre chose ailleurs.
Nous avons plus de pouvoir que nous l’imaginons : la peur, des croyances limitantes, des opinions non remises en cause, nous empêchent de prendre certains risques. Nous devons, toutefois, envisager l’hypothèse que tout ceci est artificiel et que nous avons le pouvoir de changer notre vie pour plus de bien être, moins de pression, plus d’épanouissement.
S’ouvrir aux opportunités : c’est un état d’esprit. Selon le mot célèbre certains voient des opportunités là ou d’autres voient des problèmes.